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Le blog de Michel Giliberti

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michel giliberti


Quand je pousse la porte et que je rentre chez toi, c’est toujours la même pénombre verte qui m’accueille avant de retrouver la clarté de la cour, toujours la même odeur, celle de la cuisine de ta mère, toujours la même ivresse .
Puis il y a ton petit frère Adnen qui se jette dans mes jambes avec son sourire inimaginable et qui ne parle pas encore français ; trop jeune. Il sait dire «  Bonjour » et je lui demande :« La bess ? » (ça va ?) et il me répond : « El-hemdoul-el-lah ! » (Grâce à Dieu ).
C’est ta sœur ensuite, avec ses yeux de sureau, sa bouche brillante, ses cheveux en cascade sur ses épaules et l'or de ses bracelets sur sa peau abricot.
Ta mère tarde encore quelques instants ; elle vient enfin jusqu’à moi en s’essuyant les mains dans un torchon et en baissant les yeux comme si elle s’excusait de quelque chose ou comme si elle doutait de son physique, alors que tous les hommes se retournent sur son passage quand elle fait les courses au souk de la Marsa.

Et puis au bout de quelques minutes de bavardage Adnen retourne à ses jeux d’enfant, ta mère retourne à sa cuisine, ta sœur s’éclipse avec son téléphone portable et je reste là, au milieu de la cour alors qu’on m’invite à rentrer. Mais je refuse toujours.
Je préfère m’asseoir sous le figuier et attendre…
Attendre…
T’attendre, plus exactement.
Tu aimes te faire désirer.



Tu arrives enfin et tu t’assois pour fumer une cigarette en silence tout en en faisant la gueule. Normal ! Tu fais toujours la gueule dans les premières minutes... et quand je te demande pourquoi, tu me regardes comme si tu jouais dans un western et en me lançant un : « Wallah ! tu es fou, je fais pas la gueule. » (Tu n’as pas tort, je suis fou.) Pour le reste, je ne suis pas dupe, je sais bien que tu fais la gueule parce que ça te va et que ça inquiète tout le monde…


... mais une fois dans la voiture, dès que les portes ont claqué, que 2PAC est installé dans le lecteur et que les enceintes déchirent nos oreilles, tu retrouves tes vingt ans, ton sourire et les mots de ton âge qui m’éclatent.


Le soir, quand je te ramène chez toi et qu’en descendant de la voiture, tu reprends ton petit air de macho, je ris intérieurement… Il faut bien que ta sœur et ta mère soient un peu inquiètes.
Pour un fils aîné… c’est bien le minimum !
Allez, mon frère, je reviendrai un de ces jours et on ira prendre un thé au Marsaoui, mais avant je te regarderai encore faire la gueule… rien que "pour le plaisir des yeux" comme disent les tunisiens.


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Dans les années 80, je décidai d’arrêter la musique et les enregistrements d’albums qui ne me satisfaisaient pas pour reprendre la peinture qui elle, ne m'avait jamais déçu.
J'étais très déprimé d'avoir perdu tant d'années dans une maison de disques à composer, écrire, enregistrer pour un bilan si éloigné de mes ambitions artistiques et de l'univers intimiste que je voulais créer.
Je me suis souvenu que j'aimais la Renaissance italienne et plus particulièrement le quattrocento. Celui-ci a su doucement me redonner de la force à reprendre mes pinceaux... J'étais très sensible à la statuaire antique et je la fis souvent entrer dans mes compositions ; même mes personnages furent et sont encore souvent intimement liés à la pierre.

Voici deux tableaux de cette époque où la statuaire classique est présente. Celui où l'on voit l’esclave de Michel-Ange multiplié dans un univers de verre brisé a été le tableau qui me fit démarrer définitivement dans ma carrière.


Dans ces années, j’avais le temps de sculpter. Voici certains de mes bronzes exécutés avant que je quitte Paris pour la campagne normande.

J’ai très envie de me remettre à la sculpture de façon assidue.
C’est un art difficile qui nécessite beaucoup d'énergie et je sens qu'il va falloir me lancer avant qu’il ne soit trop tard !
J'en fait encore quelques-unes, mais aujourd'hui j'ai l'ambition d'oeuvres plus conséquentes où le corps serait matière à témoigner d'une certaine idée de la souffrance, de la douleur du monde, de la mort ; des sujets violents et torturés.
Vous me connaissez... Toujours optimiste… !


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U
ne piste dans l'errance... des croquis pour me souvenir que la lumière côtoie souvent l’ombre ; que les chroniques des jours heureux sont souvent des chroniques du passé et qu’il faut encore me nourrir des rêves d’antan pour mieux construire ceux de demain, vacillants et fragiles, mais bien là.
L’usure du temps peut sublimer les objets, rarement les êtres ; je veux croire pourtant que la patine peut satiner les temps à venir.


Ces visages qui ornent les murs de mon atelier sont tous enfouis au fond de ma mémoire. J’ai mal à croire qu’un jour, assis à même le sol, tout contre un mur, je les ai faits dans la lumière tunisienne ; je les ai faits, tout enveloppé du grésillement des rares insectes osant braver la chaleur et de Moez râlant contre l’immobilisme que je lui imposais.
J’ai souvent lu que les peintres recherchaient les couleurs du Sud, des couleurs qui vibrent sous le soleil.

Je sais aujourd’hui que c’est vrai.


Ce matin, le brouillard enveloppait la maison et je n’avais aucune envie de me tenir devant mon chevalet. Maintenant il a fait place à un soleil généreux et je vais revenir sur ma toile. C’est enfin possible.
J’aimerais me lever chaque matin dans la lumière d’un jour radieux.
J’aimerais me lever chaque matin entouré des particules qui s’éparpillent dans les rayons du soleil comme des poussières stellaires.
J’aimerais me réveiller près de Jean-Charles et préparer notre petit déjeuner avec paresse avant de l’installer sur la faïence tiède d'une table abandonnée sur la terrasse, face à la mer.
J’aimerais… et quand j’aime, tout se réalise.
J’attends donc avec patience cette occupation du Soleil sur notre peau qui s’y prêtera sans résistance...

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Me voici de retour dans un des coins favoris de mon souk… en Normandie, où je calme mes blessures.
De mon étroit périple dans le sud, à déjeuner sur le pouce et à me rendre au plus vite au chevet de ma mère, il me reste l’étrange fusion de nos regards, de nos mots, de nos silences.
San Salvadour, le lieu où elle tente de recouvrer la santé est un endroit sublime et calme au bord de la mer ; les cigales sont les seules à se permettre de chanter. La végétation y est luxuriante, l’odeur des résineux, enivrante.
Le courage de ma mère est extraordinaire, mais elle veut en finir dans le fond. Elle n’accepte pas la diminution.
Ma sœur prendra le relais jusqu’à ce que je revienne à son chevet.
Quand je suis parti hier, elle m’a dit en plaçant ses mains autour de mon visage : « n’oublie pas, Trésor, tu es l’idole de maman ».
J’étais très ému et bien après mes sourires confiants de circonstance, mes larmes ont pu couler sur le chemin de retour, quand bringuebalé dans le car de 18 h 30 comme tous les jours, des jeunes gens déjà bronzés riaient aux éclats, écoutaient leur MP3 et commençaient leur vie… Étrange périple en terre de contraste.
Dès que j'ai récupéré, je reviens, c'est promis...

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C’est au cours d’un de mes vernissages parisiens en 1998, que j’ai rencontré Hicham Nazzal. Il avait dix-huit ans et demi, un visage très expressif... Immédiatement je lui ai fait part de mon désir de le peindre. Il se donna une semaine de réflexion, puis finalement, accepta. Très vite les séances de pose commencèrent avec Massive Attack en fond sonore et très vite aussi nous sommes devenus des amis.

    Il m'inspira cette première toile : "Hicham"

    Puis cette autre ,éloignée de sa personalité, mais qui mettait en avant son physique...

    J'enchainai avec celle-ci qui faisait partie d'un tryptique pour dénoncer le racisme.


À l’époque, Hicham était déjà un vrai cinéphile et il suivait des cours de théâtre privé. Sa volonté était farouche.
Rien d’étonnant d’être parvenu, si vite, à devenir comédien... Parallèlement à son métier d’acteur, il a été animateur d'émissions à la télévision, en France comme à l’étranger. Il a écrit de nombreux scénarios et d’ailleurs, il est en train de mettre sur pieds celui de mon roman « Bou Kornine ». J’en suis très heureux. Il n’y aura plus qu’à trouver un producteur…


... Hicham est très cultivé, très subtil, brillant même, mais lorsque nous sommes ensemble, il me fait surtout mourir de rire, à toujours raconter des anecdotes croustillantes doublées d'excellentes imitations. Et puis nos origines méditerranéennes sont suffisamment proches pour créer cette entente particulière des gens du sud, cette faculté à nous moquer de nous-mêmes (sans oublier les autres…)

Je ne suis pas l'agent d'Hicham, aussi je ne peux pas vous donner la liste complète de ses films ou des nombreuse dramatiques qu'il a tournées pour la télévision, pas plus que les courts métrages, mais je vous cite ses trois derniers de mémoire.

2006 SCORPION de Julien Séri,
2006 J'AI REVE de Hormoz,
2005 MUNICH de Steven Spielberg,

Vous trouverez toute sa fimographie et ses projets sur son blog.


Hicham et moi, le soir de la signature de mon dernier roman à l'automne dernier, "Blessure animale" aux éditions Bonobo, et dont le tableau "Hicham" a servi la couverture.

 

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    Voici le début de mon premier roman "Neiges d'octobre" publié aux éditions H&O en 1999 (épuisé) et plus tard édité dans son intégralité aux éditions Cylibris en 2000.

    Le bruit mat de sa nuque contre le mur ne m’a pas surpris sur l’instant, je crois même qu’il m’a soulagé. Mais là, dans le silence inhabituel, je l’entends pulser et marteler mon crâne avec la fidélité imbécile d’une boîte à rythmes.
    Je retrouve la stupeur de mes seize ans quand, dans un moment de panique, après l’avoir jetée à terre, je demeurai hébété devant une souris morte à mes pieds.
    Pareil… Même choc ! Assourdissant et silencieux… Même paix artificielle après.
    J’ai aussitôt avalé ma salive et n’ai plus bougé. Au moindre geste, la réalité aurait pu reprendre ses droits.
Délivré et perdu à la fois.
    Alors, je suis resté déconnecté, à rechercher quelque chose d’indéfinissable… Peut-être la solution ou la marche arrière. L’espoir de vivre un cauchemar.
Le plaisir du soulagement a été trop bref, et l’horreur venait de commencer.
Son immobilité m’a déconcerté. Rien, en dehors de cette constatation, ne concluait à la mort. Sa peau était toujours dorée, ses yeux vifs et sa bouche brillante d’une salive intacte.
    J’ai attendu, attendu.
    Des heures.
    Oui, des heures, puisque le soleil n’inonde plus la pièce. Ce n’est pas spectaculaire, mais déjà ses lèvres se ternissent et n’arrivent plus à garder cette moue hautaine qui lui donnait l’air de toujours se foutre de la gueule du monde. Une sorte de rictus la remplace. Et puis ses yeux ne regardent vraiment plus rien, une de ses paupières tente même de s’abaisser en un sinistre clin d’œil qui me glace le sang.
    J’amorce un mouvement qui fait s’échapper de ma gorge un cri de douleur. Ma trop longue immobilité à genoux près de lui a eu raison de mes articulations.
    L’angle de vue ainsi modifié, je crois une nouvelle fois qu’il n’est pas mort. Je m’approche. Ma main, après une hésitation, se pose sur son visage.
Presque froid ! Déjà ! Merde !
    C’est terrible. Ce matin, en se levant, il ignorait que pour la dernière fois il actionnait les lamelles des stores avant de boire son dernier café.
Comment se fait-il que nous ne sentions pas venir cet ultime instant de rupture… Faut-il être fou pour accréditer nos capacités à pressentir les évènements… Rien !… Rien sur sa face de bellâtre ne reflétait une quelconque inquiétude, une quelconque angoisse du devenir. Il s’était admiré longuement dans le miroir de la salle de bains tandis que je cherchais un pansement pour une stupide coupure au doigt. /...


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Quelle ne fut pas ma surprise en apprenant que sur You Tube, il y avait un diaporama des répétitions de ma pièce "Le centième nom". On y voit Salim Kechiouche et Samuel Ganes en compagnie du metteur en scène, Stéphane Aucante.
Bien sûr ce n'est pas très vivant ; la pièce était si physique, si violente parfois, mais ça m'a bien plu de revoir ces petits bouts de travail autour de cette pièce dont j'attends toujours un possible retour.

Dommage que pour habiller ces images de travail on y entend une musique grandiloquante, "une musique d'antiquaire", alors qu'au final, il y en avait une autre, orientale et magnifique, plus adaptée au lieux où ce drame se déroule, c'est à dire en Palestine ou en Israel...

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Tous les voyages doivent se rapprocher du langage. Les miens s’entretiennent souvent avec celui de l’enfance. Mon imaginaire est proche de ces années où j’avais des passions complices, voir charnelles, avec certains objets, certaines matières… où je faisais des voyages qui me parlaient… des voyages au bout du verre, des billes, des perles.
En plein soleil, sur la terrasse du cinéma l’Olympia, j'installais des objets en verre au fond d’une bassine d’eau et je plongeais ma tête dedans pour les regarder au plus près, dans un silence que j’imaginais être celui des fonds marins. J’y ajoutais des billes qui paraissaient plus grosses sous l’eau. Ces jeux égoïstes me comblaient plus que tout autre.


Je ne me suis jamais éloigné du verre. Il me suit comme une ombre transparente ; il est mon réconfort, mon appui fragile, mais aussi ma blessure. Je le peins, je le casse, il est matière à émotions.
Il coupe, il tranche, il caresse, il est « Vers »  il est « Ouvert » , il est vert, comme tes yeux bleus.
Mon père m’avait fabriqué un magnifique kaléidoscope et je ne comptais pas les heures passées à regarder les motifs saphir, rubis, émeraudes et topaze des petits tessons qui dansaient leur ronde géométrique dans la lumière du ciel tunisien.


Aujourd’hui, je continue de collectionner les objets en verre, pourvu qu’ils soient  ternis, abîmés par le temps ou par le flux et le reflux des vagues. C’est ainsi que je ramasse les bouts de verre usés trouvés au hasard de mes promenades sur les plages et que j'en rempli des bocaux ; mais j'aime par dessus tout engranger de massives perles africaines en pâte de verre ou en terre cuite, jusqu’aux œufs dépolis et grossiers à trois sous qu'on trouve dans les magasins. Il ne faut pas que ce soit cher, non simplement transparent, patiné, arrondi, caressant… juste à ma correspondance, juste à mon langage ; juste à mon voyage.


Tes blessures de toujours
S’arrêteront bien vite
Et les larmes de tes yeux
Comme des larmes de verre
Pourront vite se figer
D’un oubli cristalin.

© Giliberti / 2007

 
Comment résister à ces transparences...
Comment ne pas y voyager ...
Un peu de mes récoltes côtières...

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Tout près des ruines de Carthage, celles que l'on connaît et qu'on visite, il y en a d'autres, éparpillées en lisière de la colline de Byrsa, dans le périmètre où la reine Didon régnait autrefois. Je m'y promène souvent et, cet après-midi là, alors que j'étais avec Raouf, nous nous étions arrêtés devant un portique étroit et élancé, donnant sur le vestibule d'un monument ...


... Il faisait très chaud et à quelques pas de là, parmi les blocs de pierre, vestiges muets de cette époque glorieuse de Carthage, les oliviers et les résineux étaient si immobiles dans l'air brûlant et jaune, qu'ils en devenaient irréels... Raouf s'en alla chercher un peu de fraîcheur et d'ombre à l'intérieur du bâtiment.


... Avant qu'il ne revienne vers moi qui étais demeuré en plein soleil, je lui demandai de rester un moment au centre de cet antre de marbre...


... Le temps de quelques photos, avant de continuer la promenade.


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Dans les années 80, je peignais souvent des femmes, des bestiaires et quelques bizarreries fantastiques associant le tout.
Aujourd’hui je me suis assez éloigné de cet univers, mais je ne résiste pas au plaisir de ressortir des tiroirs quelques
photos de ces toiles disséminées un peu partout en France comme à l’étranger...


... À cette époque, je sortais de plusieurs années d'une totale immersion dans le milieu de la chanson qui m’avaient amené à faire trois albums chez CBS dont j'étais si peu satisfait que j'avais réussi à rompre le contrat de sept ans qui me liait à cette maison de disques et d'en ressortir fragilisé, mais libéré ; je m'étais promis de ne plus me frotter à la musique et de me replonger dans la peinture que je n'avais jamais cessé de porter en moi depuis l'enfance...


...  Plus un accord de guitare. J’ai tenu bon pendant dix ans. Seule, l'écriture demeurait associée à la peinture ; elle aussi me permettait de prolonger mes fantasmes d'enfance où écrire prenait tout mon temps...


... Et puis doucement tout est revenu. Maintenant j’ai fait à nouveau la paix avec mes amours musicales ; je compose et écris des chansons, mais pour mon simple plaisir...






...Entre 1985, j'ai quitté Paris pour la campagne normande. C'est un autre monde, une autre vie, mais ce n'est jamais qu'à 120 km de la capitale et je prends régulièrement mon indispensable dose de pollution ...



... Ma peinture qui depuis quelques années avait commencé à être remarquée dans les salons commença aussi à très bien se vendre. Dès lors, j'ai eu la chance d'être exposé un peu partout à l'étranger et surtout à Paris...


 ... Enfin à la fin des années 90, j'ai eu la joie immense d'être publié... là, ce fut le nirvana absolu...

© Giliberti / dessin mine de plomb et rehauts de blanc.

... Et pour conclure, ne perdons pas les bonnes habitudes... Un p'tit mec.

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