À soixante kilomètres de la belle petite ville du Kef se trouvent les ruines romaines de Dougga. Ces vestiges que je connais depuis l'enfance sont exceptionnels. Ils ont l’avantage d’être bien conservés et surtout de s’étendre sur ce paysage toujours unique et « biblique » déjà décrit…
Quand on découvre ces lieux, un peu difficile d’accès, on comprend que les Romains s’y installèrent. Les plateaux sur lesquels ils se dressent les protégeaient des ennemis et les plaines généreuses que le fleuve Mejez el Bab arrose assuraient les cultures. Plus loin d’ailleurs en remontant vers Aïn Draham et Tabarka, la végétation est très dense et l’on compare (un peu à tort à mon avis) cette région à la Normandie parce que les pluies y sont abondantes et que la neige y pointe son nez. Croyez-moi, rien à voir…
Ici tout est encore à peu près préservé de l’urbanisation sauvage qui, hélas, défigure de plus en plus le pays. On éprouve un sentiment de retrouvailles avec ce passé romain de la Tunisie qui fut tant de fois envahie, au point que beaucoup d'entre eux refusent l’identité arabe dans laquelle ils ne se reconnaissent pas vraiment (en dehors de leur religion musulmane).
Ils se sentent avant tout des Numides… des Berbères. Ce sont les origines qu'ils revendiquent. Leur culture est faite de tant de mélanges que ce mot « arabe » leur semble réducteur et ils le laissent bien volontiers aux vrais envahisseurs « arabes», ceux qui s’imposèrent rapidement sur leur territoire dès l’an 646.
Ces lieux un peu hantés par ce passé romain semblent donner envie de flâner aux Tunisiens et surtout aux paysans qui s’y promènent tranquillement tout autour.
Chacun d'eux est prêt à vous raconter une anecdote et comme dans toute la Tunisie, le sourire et le mot « bien venu » sont de rigueur.
Le Capitole, au sommet de Dougga...
Son chapiteau...
Ses colones corinthiennes...
Une vue depuis le côté gauche du Capitole...
Le Capitole, une dernière fois... j'ai photographié bien d'autres endroits sur place, notamment le théatre si intacte de ce site si vaste, mais difficile de faire un choix...
Les thermes antoniniens qui dominent la vallée...
L’arc de Sévère Alexandre près des figues de barbarie et des oliviers centenaires...
Jean-Charles (mon compagnon depuis trente-cinq ans) est littéralement tombé sous le charme de ce site que le silence (à cette époque de l'année) rend si envoûtant. Il ne voulait plus partir. Si je l'avais écouté, un âne et des moutons auraient suffi à faire de lui l'homme le plus comblé de la terre...
D'ailleurs, nous sommes là, tous les deux, à nous demander si ce désir un peu utopique n’est pas finalement le seul vrai projet nouveau à l'heure de la fuite des capitaux et des derniers litres de pétrole, à l’heure des bourses vides des hommes et de celles des marchés qui dégringolent…