À Toulon, l’hôtel où j’ai séjourné a fait le choix de décorer ses chambres sur le thème des cinq continents ; le hasard m’a plongé en pleine Asie, tout y était rouge, noir et tamisé. Ce décor propice au dépaysement me convenait tout à fait ; je me sentais doublement exilé puisque le soir je lisais "Oviri" Écrits d’un sauvage, un recueil de correspondances et de textes de Paul Gauguin qui évoque ses séjours en terres océanes et son long chemin de souffrance.
J’ai toujours été sensible à cet artiste authentique, vulnérable et fort, dissident et anarchiste.
Moi qui hésite tant à employer des couleurs vives, voire primaires, j’ai toujours vibré pour les siennes, puissantes et chaleureuses qui martelaient ce que l’on jugeait exotique pour l’époque et qui était en réalité le portrait amoureux d’un lieu poétique et charnel, la description de la vie d’un homme libre.
Un soir, au moment d’éteindre la lampe de chevet, m’est revenu en mémoire ce tableau dans lequel j’avais osé la couleur et où la beauté de David, un de mes modèles et amis, s’imprégnait du rouge et du vert d’un « Voyage secret » titre que je devais réemployer pour nombre de mes livres d’arts, tant il donnait en deux mots l’idée que je me fais de mes explorations en peinture.