Et voilà… j’ai remis le pied dans l’ancienne trace, comme je le fais si souvent.
Difficile d’expliquer le bonheur immense qui m’étreint quand je flâne dans les rues de mon enfance, même si ces dernières ont un peu vieilli ou se sont dégradées. Ça ne fait rien, le monde change, échange les mondes. J’ai changé, moi aussi. Je n’ai plus dix ans, je ne fais plus les courses avec maman, je n’élève plus de vers à soie, je ne joue plus aux billes ou aux osselets. Je ne grimpe plus à l’arrière de la mobylette de papa.
L’atmosphère de Menzel Bourguiba est particulière. Elle est faite d’un curieux mélange de la Tunisie, du Brésil, de Cuba et de la France. Certains diront que ce constat est farfelu, mais voilà, c’est le mien et j’écoute mes yeux... Lorsque je vois des façades de vieilles bâtisses coloniales repeintes de couleurs vives, quand je vois tant d’enfants jouer dans les rues, tant de jeunes gens adossés aux murs, quand j’entends les musiques, les voix, les rires, cela m’évoque ces lieux si photogéniques, si parlants qui ont inspiré tant d’artistes.
En mai, les éditions Arabesques (Tunisie) ont publié mon dernier livre qui évoque mon enfance tunisienne "Maintenant je suis p’tit", ce titre en dit long sur ma maturité réelle. Cette aventure littéraire m’a donné l’envie de publier un autre livre, tout en photos et en poésies, autour de cette ville autrefois appelée "Le petit Paris" et qui naquit de la décision, en 1897, du Gouvernement français qui souhaitait un arsenal basé entre le lac de l’Ichkeul et celui de Bizerte. Elle s’appela Ferryville en honneur de Jules Ferry, puis Menzel Bourguiba (Maison de Bourguiba) en 1956, à la fin du protectorat français.
Je referme vite cette parenthèse, car je ne suis pétri que d’impressions, de ressentis et d’ivres palpitations. L’histoire, la vraie, appartient aux hommes et je ne suis qu’un courant d’air. Aussi mes yeux et mon cœur se contentent de considérer ma ville natale qui sait rire d’une certaine tristesse qui lui colle à la peau un peu comme à Bizerte, un peu comme si ces deux villes étaient victimes d’un mauvais sort, en fait, un mauvais sort politique ! Là aussi je ne m’aventurerai pas à tout expliquer, ce genre de littérature mérite le travail d’un historien.
Aussi regardons avec les yeux pleins de tendresse cette ville meurtrie qui ne sait plus où commencer à panser ses plaies… sachons la regarder en ne l’accusant de rien… tant de gens courageux et que j’aime y vivent. Aimons là, déplaçons-nous en masse pour aller la visiter, il n’y a pas plus accueillant qu’un Menzelien. Nous en reviendrons différents, modestes, heureux et réconciliés d’avec nous même, infimes particules nécessaires du grand négoce des sentiments.
Une des avenues principales à l'heure de la sieste. Magasins, cafés, restaurants s'y s'alignent en toute simplicité.Cet homme ne sera plus seul dans moins de deux heures... il n'y aura plus une place de libre.Jeunesse de toute part... longues conversations... La rue de mon enfance, quasi immuable...Taxis jaunes, murs jaunes, blancs, turquoise...Tout pour ne pas avoir les idées noires.Peut-on trouver un mur plus photogénique ?J'adore les rencontres avec les mobylettes... de vieilles amies. Le petit kiosque à musique toujours entretenu. Il y avait des fanfares autrefois, de petits bals les jours de fête.Danger ? quelle idée saugrenue !Que de fois je me suis promené ou assis à l'ombre de ces arbres sur cette petite place.Voilà... tout pareil, le temps n'existe pas. Ce petit garçon, c'est peut-être moi.Quoi qu’on en dise, on restaure à Menzel-Bourguiba...La preuve... quelle fière allure! Une proue de bateau !Oui, c'est un peu décrépi et alors ? C'est beau, non ?Voilà, le monde commence à venir dans les cafés, les habitués sortent les cartes... ça va durer, ça va jouer, ça va être bruyant, ça va être la vie d'un dimanche après-midi...Pareil à l'intérieur, et les chichas (narguilés) embaument l'espace.Joueurs précoces, éclairage plus tamisé. À cet âge, as de coeur et de trèfles à tous les coups !Miami?Quand on ose la couleur,on doit tout oser... allez, un effort !Un vrai décor de cinéma...Rubans roses dans le vent tiède, murs azur et cheveux gris… le temps passe, silencieux de tant de souvenirs bruyants.Une rue de hasard. Pétarade d'une mobylette dans le silence de la sieste. Procès immédiat si j'étais policier !
La même de plus haut...Les habitants sortent de leur torpeur du début d'après-midi et commencent à se rendre dans le centre de la ville... Les enfants se défoulent et vous sourient... toujours ! Très importante réunion ! L'enfance est la période la plus sérieuse de notre vie, elle mérite bien une réunion au sommet. Un des boulevards principaux, un des plus beaux, bordé de platanes, notre rue de Rivoli à nous. Il mène à la petite église devenue aujourd'hui une bibliothèque... Comme quoi, la religion peut parfois mener à la culture! Toujours le même boulevard...Sous tous ses angles...Un début de Cuba commence à s'installer au rez-de-chaussée. Manque plus qu'une Américaine garée devant.Là, on le voit mieux...Ici, c'est terminé du sol au plafond... specatculaire ! Les français n'y auraient même pas pensé...Et c'est reparti pour un tour...Matricule étranger ? Vacances au bled... Cool ! à l'arrière d'une mobylette... un vrai transat !Émotion à vif devant un des piliers du marché central où je faisais les courses avec maman... C'est dimanche, c'est vide... en semaine, ça grouille de monde. Séchent les piments.Même entrée, vue de l'intérieur...L'intérieur...La boucherie ferme... on nettoie, on range.. Une partie du toit du marché...Au-dessus d'un café bien sympathique...L'intérieur du café...L'équipe derrière le bar...Le propriétaire à gauche et un ami... tous deux adorables de gentillesse. Un des boulevard en direction de la place qui ouvre sur la sortie de la ville...Une salle de billard, ambiance et bruits garantis...Concentration...Déconcentration...Le Michael Jackson du quartier qui a fait son show juste avant le départEt moi, immortalisé par mon amie Garance en balade avec moi. Je pose devant l'entrée condamnée du cinéma l'Olympia qui prit feu en 1986 et où j'ai passé toute mon enfance puisque j’habitais au-dessus et que et papa s'occupait de la gestion. Je n'ai jamais raté un film, une pièce de théâtre un concert... Je referai un mini "doc "sur Menzel-Bourguiba avec des photos d'autres lieux et notamment de sa périphérie, plages, bois, collines et bien sûr de ses habitants, ce qui m'intéresse le plus. Là, je n'avais pas vraiment le temps.