Moez est un de mes modèles préférés. C’est aussi un ami. J’aime beaucoup traduire sa mélancolie au fil des nombreuses toiles que je fais de lui. Il a une façon amusante de poser. Chaque fois que je lève mon regard sur lui, il me fait un clin d’œil, sourit, et reprend son sérieux.
Au début, il n’aimait pas poser, mais l'année dernière, lors de mes expositions à Carthage et à Bizerte, après s’être vu sur plus de vingt toiles de grand format, ça a été le choc. Il ne s’attendait pas du tout à ça. Mon travail, même s’il le connaissait déjà à travers des livres ou des affiches, ne déclenchait chez lui que la curiosité.
Maison de la culture Cheikh idriss / Bizerte
Le soir du vernissage et les jours qui suivirent, des jeunes gens garçons et filles s’intéressèrent à lui, lui posèrent un tas de questions, un journal écrivit même « Moez, le héros de l’exposition ». Je me souviens qu’à la lecture de ce papier, il a rougi. Il réalisait enfin tout le chemin parcouru depuis les simples poses sur la terrasse, à la campagne, ou à la maison, jusqu’au rendu final. Depuis il apprécie ces moments privilégiés entre un artiste et son modèle.
À la fin du vernissage de Bizerte, Jean-Charles mon compagnon, Jalila, ma grande amie, ses enfants, et Moez bien sûr, sommes tous allés à Gammarth dans un bar branché en plein air où nous avons bu pour nous détendre de la longue soirée… À un moment, au milieu des rires et de la musique, Moez s’est penché à mon oreille et m’a avoué qu’il était heureux, comme jamais. Il a ajouté : « J’ai le moustique… » (Son expression pour dire qu’il était un peu ivre.)
Il faisait chaud, l’air était embaumé. Dans l’ambiance tamisée, une piscine éclairée de l’intérieur nous renvoyait le cristal bleu électrique de son eau. J’étais heureux. J’avais tous ceux que j’aime autour de moi, mon exposition avait fait grand effet et j’étais sur ma terre natale…
De beaux souvenirs…