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Le blog de Michel Giliberti


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Un passage dépouillé de code et de porte, un passage symbolique, tout juste évoqué, avant de franchir le pas.
Un filet de sang sur le mur signe l’hésitation et la difficulté du personnage à s'échapper de l'encadrement contre lequel il se maintient encore, mais son regard est franc. Il vaincra.
Des braises intimes d’une vie ne restent souvent que les cendres… Plus de couleur, à peine le geste, à peine sa marque.
Marcher, sans se retourner.

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Salammbô… Ce nom résonne en moi depuis bien longtemps. Flaubert y est pour quelque chose ; l’acteur Jacques Sernas également. Mais en dehors de son iconographie historique, romanesque et cinématographique, Salammbô est un quartier de Carthage. C’est là où vivait Mohamed, le garçon qui m’inspira le héros de mon roman Derrière les portes bleues, comme je l’expliquai dans mon précédent article.
Salammbô grouille de vie, Salammbô souffle, Salammbô geint ; il habille les silences et travestit les rêves les plus obscurs. Les piétons investissent les routes et évitent soigneusement les trottoirs. Tout le monde se parle d’une rue à l’autre, s’interpelle et se presse dans les petits magasins d’alimentation qui dégagent les parfums d’épices et croulent sous les grappes de piments rouges séchés et accrochés aux murs. C’est en voiture pourtant, au milieu de cette foule indisciplinée qui me donnait des frayeurs, que je me rendais chez Mohamed.

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Quelques années plus tard, celui-ci s’installa en France et, à son tour, il vint me rendre visite. Lorsqu’il découvrit les rues vides, le calme sidérant et le silence absolu de mon hameau, il pensa qu’il était arrivé quelque chose de grave.
Musique, thé et discussion amicale me permirent, comme autrefois dans la petite cour de Salammbô, de le photographier. 
 
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Je garde ainsi ces quelques portraits pleins de gravité où je retrouve intactes ses inquiétudes de l’époque, quand vivre à Paris l’impressionnait encore et que rencontrer l’amour lui paraissait impossible.
 
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Cet après-midi-là, il ignorait que tout se passerait bien, que je serais même le photographe « officiel » de son mariage six ans plus tard, qu’il deviendrait papa, et serait heureux.
 
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Il y a quelques années, j’ai séjourné dans un petit hôtel tunisien à Guengla, tout près de ma ville natale. Le décor y était idyllique : une terrasse donnant sur la mer, des pins, des eucalyptus pour la fraicheur et l’ombre, le parfum des fleurs de jasmin et surtout un silence spectaculaire bercé du seul clapotis de l’eau qui arrivait au pied de la terrasse.

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J’ignore les raisons qui me permirent tout au long de ce séjour de me retrouver absolument seul dans un lieu de grâce si exquise. Le service était d’une absolue discrétion ; je ne rencontrai personne. Chaque jour mon lit était refait et, sur l’oreiller, je trouvais toujours des fleurs de jasmin. Mystère absolu. Ce séjour feutré m’a beaucoup marqué… Très souvent il recharge ma mémoire d’impressions suaves.
Hélas, cet hôtel a changé de propriétaire et ressemble désormais à tous les autres ; son infrastructure a été largement modifiée pour être plus rentable.
 
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La vue incroyable et la barque qui m'inspira un de mes poèmes...

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Le matin, quand le soleil était encore à l'horizon et que je prenais mon petit déjeuner sur la terrasse.
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Bien plus tard, alors que j’étais dans l’écriture d’un roman, cet hôtel, autant que sa quiétude, s’est imposé à moi pour planter le décor d’une des scènes clefs de l’histoire. Comme un metteur en scène, après avoir fait des repérages, c’est là que j’ai voulu que mon héros parisien, Jérémy, chanteur has been, alcoolique mais flamboyant, accepte enfin l’idée d’être tombé amoureux de Tarek, un jeune rappeur, tchatcheur, charmeur, rencontré au cours de l’un de ses concerts ; un garçon qui bouscule sa vie d’hétérosexuel et piétine son passé sulfureux…
Oui, c’est dans cet hôtel de Guengla, déserté de toute clientèle, qu’après des mois de conflits et de heurts violents, Jeremy, vaincu, baissera les armes et s’abandonnera à Tarek qui n’attendait que ça…
J’aime écrire sur ce que je connais.
Ici, toutes les pièces s’emboitaient.
J’avais pour décor Paris ( ma ville préférée ), la Tunisie ( mon pays d’amour ), et le milieu musical ( j’ai longtemps pratiqué le métier de chanteur pour en connaître ses vices et ses tortures ).

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Il ne me restait plus qu’à trouver le jeune Tarek… et là aussi, je n’ai eu qu’à me tourner vers celui qui est toujours un de mes amis, Mohamed, rencontré à Salammbô, ici sur le seuil de sa maison.

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C’est ainsi qu’une partie de mon roman Derrière les portes bleues a pris forme, jusque dans sa couverture, puisque c’est un des tableaux que m’inspira Mohamed qui l’illustre.

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Voici un petit extrait de "Derrière les portes bleues" directement inspiré par ce panorama immuable qu'il m'était offert de contempler tous les matins depuis la terrasse de ma chambre d'hôtel.

... /...Depuis plus d’une heure, Jérémie admire la barque frêle d’un pêcheur, au loin. Elle est plantée là, au milieu de la mer, irréelle.
Un regard à gauche, elle n’existe plus.
Un regard à droite… Pareil.
Mais elle est là, immobile ! Avec le clapotis de l’eau à contre-pied de l’immense terrasse blanchie à la chaux.
Derrière, la chambre ! Sa porte bleue entrouverte. Et sur le lit, allongé en chien de fusil, Tarek ! Son sommeil émouvant.
Lui est devant, comme le capitaine d’un navire, face à l’horizon et la mer gris de payne.
Un léger vent caresse sa peau encore vibrante de l’autre.
Il n’a pas pu s’endormir après…
Trop peur du réveil… Tout est si nouveau, si insolite. Il n’explique rien de son désir. Il ne le nomme pas.
Comment a-t-il pu dépasser la simple attirance qui, en soi, n’est pas exceptionnelle ? Qui a pu instiller au fil des jours un tel changement ?
Il a vécu la nuit la plus insensée, la plus subtile, la plus vraie. À épouser le mot, le geste ! Et pourtant un vent de folie a balayé la plus élémentaire de ses convictions. Au-dessus du visage de Tarek, c’est la paix qu’il a rencontrée, et il s’en étonne. Les sourcils de Tarek, ses lèvres, son nez, chaque contour lui a paru si évident, comme à la fin d’un voyage, quand l’avion rencontre la terre et que, dans l’ancienne trace, le pied retrouve ses repères.
Il n’oubliera plus…
Aucun murmure, aucun gémissement ne l’a à ce point envoûté comme ceux de Tarek quand il s’est abandonné, ivre de vie, fragile et fort, offert à ses pulsions. Ses soupirs et ses râles ont été à l’image de ses phrases, contractées, de ses mots en verlan, si beaux, si déroutants.
Actuel d’amour !
Non, il n’a su s’endormir après.
Tarek, lui, a sombré dans un sommeil sans nom… Repu, désarticulé.
Victorieux.
Et avant cette nuit, il y avait eu dans l’après-midi la plage des grottes… Le varech têtu, enroulé autour des jambes, le sable curieux… La première fois.
Il y avait eu l’accord, sans précédent… Les mots dans l’oreille… Murmures d’hommes ! Et puis l’arrivée à l’hôtel de Guengla… Les regards complices du gardien, sa compréhension et, surtout, l’incroyable spectacle d’un hôtel vide, blanc, aux façades croulant sous les mauves bougainvilliers et dont les chambres, à l’ombre des eucalyptus géants, donnaient sur la mer turquoise. La mer qui s’épanche… La mer à l’infini.
Et cette barque !
Et il n’est que 7 heures.../...
 

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L’orage grondait depuis des heures ; des éclairs balayaient un ciel devenu anthracite. Sidi Bou Saïd vivait au ralenti dans l’attente d’un déluge annoncé.
Assis sur le canapé, je fixais le patio grand ouvert. Je ne voulais rien perdre de cet étrange moment, juste avant l’averse, quand la chaleur vous oppresse et qu'aucun souffle n’agite les feuilles des arbres.
Quelques fleurs de bougainvilliers gisaient au sol, papillons mauves sur le marbre. Le ciel s’assombrit encore. On aurait pu se croire en soirée. On ne voyait presque plus rien. Je me levai pour allumer quelques lampes, quand une déflagration inimaginable déchira mes oreilles. J’appuyai sur l’interrupteur. Panne d’électricité. L’obscurité s’épaissit encore. De grosses gouttes de pluie éparses et claquantes commencèrent à frapper le sol.
Medhi qui se reposait dans la chambre apparut, à moitié endormi.
La foudre l’avait réveillé. Machinalement, il ferma les portes du patio pour éviter que l’eau ne s’infiltre dans la maison.
À tâtons, je partis chercher des bougies dans les placards de la cuisine. Mon empressement à renouer avec la lumière amusait Mehdi. C’est pourtant lui qui trouva les bougies, lui qui les alluma ; au bout de quelques instants, leurs flammes redonnèrent vie à l’espace. Dehors, des trombes d’eau s’abattaient maintenant avec un bruit infernal. Je regardai Mehdi dans la nouvelle douce lumière. Il semblait repus et satisfait. Je me saisis de mon appareil photo.

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Il s'
étira longtemps, puis toujours très à l'aise devant l'objectif, m'offrit son grand sourire.
« Je vais prendre une douche, lança-t-il en baillant bruyamment, J’ai trop chaud ! »

Je le vis s’éloigner avec une bougie à la main comme on le faisait autrefois quand on glissait, fantomatique, de pièce en pièce, et que des formes mouvantes donnaient vie aux murs. 
 

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Quelques instants plus tard, je le rejoignis avec mon appareil photo… Je voulais saisir son visage et son corps que la flamme de la bougie rendait picturaux dans l’espace étroit de la salle de bain. 

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Les îles de Kerkennah… je les ai découvertes, il y a quelques années.
J’ai tenté naguère de vous les faire partager à travers le noir de cette fenêtre ouverte sur les vôtres. 
 
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On accoste à Kerkennah après avoir embarqué à Sfax. C'est un petit voyage folklorique au milieu d’une foule joyeuse, des chants, des bruits, des radios qui déversent autant les musiques orientales que les Anglos saxonnes. Le transition commence là, pendant cette traversée, mais à une vingtaine de kilomètres, le calme des îles se révèle être le vrai dépaysement.
 

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  On le ressent dès que l'on pose le pied à terre..

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Routes mangées par le sable, palmiers à n’en plus finir, grenadiers, figuiers… Une île, comme un trésor ! Une île qui offre, aux détours des sentiers, ses marabouts vert et blanc, ses maisons ocre et bleu et le sourire des insulaires  assis tranquillement ou de ceux qui se promènent main dans la main.
Il règne sur cette île un parfum étrange de sel, d’épices et de terre brûlée.  Par endroits, des palmes mortes entassées au sol donnent à l’air surchauffé l'odeur des foins .

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Que pourrais-je ajouter aujourd’hui pour décrire ce petit paradis ? Je ne sais pas vraiment, sinon que son évocation exalte toujours mes sens... 
 

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... comme ces immenses marabouts contre lesquels certains s'adossent en fin d’après-midi pour prendre les derniers rayons de soleil et rêver. Moi je rêve d’une maison qui ressemblerait à un marabout.

 
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J’ai roulé lentement, vitres baissées. C’était la fin de la journée ; le soleil déjà bas offrait des contrastes magnifiques. Sur la côte, des jeunes gens prenaient du bon temps sur des embarcations fluides et silencieuses. Des hommes, pantalons retroussés jusqu'aux genoux, pêchaient, d'autres discutaient. Les enfants se couraient après. Il y avait une grande simplicité des êtres et des choses, de celles qui me confondent.

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J’ai arrêté la voiture et je me suis assis en retrait d'un ponton où des femmes en robes et plongées jusqu'aux cuisses lavaient de la laine en la frappant avec un battoir.

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Le soleil accéléra sa descente jusqu'à l'horizon. L’île passa du bleu à l'orange. Les pêcheurs battaient les vagues avec des ramures de palmier pour effrayer les mulets qui, scintillants, bondissaient hors de l'eau et retombaient sur des claies. D’autres récupéraient les poulpes pris au piège dans des gargoulettes accrochées aux récifs.
Je pense qu'un homme triste est un homme qui n'a jamais connu cet espace-temps, où ce que vous dites, ce que vous faites devient un privilège.

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Je commençais à avoir faim et je songeais à trouver un petit restaurant, mais mon regard accrocha celui d'un garçon qui assis avec des amis dans les derniers rayons de soleil, m'invita à le photographier.
 

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Protégé par mon appareil photo, je considérais avec amusement ses yeux qui ne lâchaient pas l'objectif et donnaient ainsi l’impression de me fixer ardemment.

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Puis il s’est levé, s’est dirigé vers moi à pas lents tout en me faisant signe de continuer mon travail. J'ai répondu à sa demande et à son sourire. Puis une fois près de moi, désabusé et charmeur, il me parla de tout et de rien comme si nous étions de vieux amis.

 

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Enfin, comme les mots me manquaient et que je ressentais la fatigue mon voyage, je le quittai à regret, mais au moment de partir, il me donna son numéro de téléphone.
 

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Vitres toujours baissées dans la chaleur du soir, j'ai roulé  très lentement jusqu'à l'hôtel en suivant le rivage, le bras ballant à l'extérieur de la portière comme un vrai Tunisien, à respirer cet air si particulier qui enferme les îles.
Après une bonne douche, un bon repas, je suis ressorti apprivoiser la nuit nouvelle. J’avais un numéro en poche. À quoi pouvait ressembler Kerkennah , la nuit ?

 

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Abdoul-balustrade-Aux matins encore mauves des nuits si récentes, la terrasse est intacte, blanche et vierge, silencieuse..

Sidi-Bou-SaidDans l’écrin encore sombre des arbres et des buissons, Bou Kornine palpite et dessine l’horizon.
J’ai tant dit des parfums et des bruits de Sidi Bou Saïd qui s’éveille… Comment faire autrement quand l’histoire se répète et m’émeut chaque fois ?

abdoul-terrasseÉtranger !
Je suis l’étranger ! Et comme tous les étrangers, je décode et je conte ce qui ne m’appartient pas.
J’ai besoin des voyages sur terre et sur peau, de la mienne contre celles qui me soufflent « tout cela est si bref » et m’invitent à me dire « mieux vaut mourir de leurres magnifiques que de vérités banales ».

abdoul-terrasse-1Aux matins encore mauves des nuits si récentes, la terrasse est intacte, blanche et vierge, silencieuse…SIDI-BOU-SAID-B9

Par la porte entrouverte, ses départs feutrés sont aussi mystérieux que ses arrivées, quand enfin, pointe l’heure si belle des leurres.

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C’est à l’heure des vapeurs, quand tout devient ouaté
Que les corps se détendent et que s'ouvre l'esprit.
Plus d’empreintes sous les doigts, d’interdits dans les gestes
C'est la fièvre brûlante et la course au ruisseau.
Dans le temple embué de parfums et de notes 
Le satin est présent, moite et chaud à l’ouvrage.
Feu aux joues, doux sourires puis soupirs à genoux
Chaque prince s’enivre des plaisirs roturiers.

© Giliberti 
 

Hammam-1

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moi-petit-2
L’ombre du temps farde mes yeux de cernes si gris que tout le ciel d’hiver semble s’y être invité. 
À ce regard nourri des ans, s’ajoute le pli d’amertume au coin des lèvres qui me donne l’air d’un sage, moi qui, dans le fond, ne décolle guère de l’âge des bonbons, des Dinky Toys et des ballades en famille, quand sous le soleil qui aveuglait papa, j’insistais : « Encore une photo !... Encore une photo ! »

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Alan-6Petit rêve si pâle
Déclic sur fond d'ennui
Heures bruyantes, tristes et sales 
Des poubelles dans Paris.
Un garçon me sourit
Puis regarde vite ailleurs
De peur d'être incompris
Quand il n'est que douceur.
Petit rêve en rafale
Intime espoir des rues
Aux heures trop animales
Des rencontres perdues.
Un garçon qui travaille
Puis s’accroche fataliste
Au camion qui cisaille
 Ses mains d'équilibriste. 
Petit rêve en cavale 
Froid silence qui m'attriste
Tant il rend bien bancales
  Mes beaux désirs d'artiste. 

© Giliberti 
 

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Je marchais dans Dougga au centre des ruines romaines… C’était à l’automne de l’année dernière. Je m’étais un peu éloigné, recherchant une solitude qui m’est souvent nécessaire, quand, au milieu de nulle part, ces quelques fleurs me sont apparues.
La photographie des choses et des lieux ne me passionne pas, mais je ne sais pourquoi, ce bouquet isolé, un peu comme je l’étais alors, me donna l’envie de capter sa fragile image.
Depuis plus d’un an, ces fleurs mauve pâle étaient rangées aux oubliettes comme dans un herbier, et voilà que je les redécouvre.
Aussitôt, je ressens l’émotion, la douceur de ce jour, le silence alentour et les parfums fanés de la campagne après la pluie, alors, je laisse l’herbier ouvert, encore un peu.
 

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Le blog de Michel Giliberti

Mon travail d'artiste peintre, auteur et photographe...

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