Djerba… je ne sais plus exactement sur quelle plage, je ne sais plus dans quel silence était-ce… je sais seulement que l’air était à la fois salé et épicé, brûlant et ennivrant.
À l’ombre sable d’un bosquet de palmiers, une famille se reposait de la chaleur tout en discutant… j'entendais comme s'il s'agissait d'une lancinante musique, leur bavardage interrompu de rires et des cris des enfants.
À cet instant apparurent deux jeunes garçons partageant le même cheval drapé d'améthyste.
Ils étaient en grande conversation, le plus jeune semblait extrêmement directif.
C’est lui qui me remarqua en premier et me fit un geste amical. Un geste de rappeur ! Tous les enfants du monde, désormais, utilisent cette gestuelle un peu réductrice, majeurs et index écartés en forme de ciseaux ou poings fermés dans la parenthèse du pouce et du petit doigt dépliés, comme on le voit sur cette photo.
Aussitôt, celui qui montait le cheval vint à ma rencontre, tout sourire, et entreprit une véritable parade à laquelle je ne m’attendais guère et qui sut m’éblouir.
J'aurais pu prendre davantage de photos, mais ayant toujours préféré être spectateur en "vrai" plutôt que de l'être derrière un objectif, je me suis contenté de saisir l'impression que donne un cheval qui se dirige ainsi vers vous. Très impressionnant !
Très vite, son compagnon de jeu ou son frère lui ordonna de descendre, puis après m'avoir explicitement ordonné de le photographier et de le placer sur Facebook (nouveaux rites désormais) il monta le cheval à son tour avec un visage arrogant mettant un point d'honneur à montrer sa capacité à chevaucher. Sacré caractère que celui de cet enfant de Djerba.
Le cheval lui obéissait sans la moindre hésitation.
Après une série de figures toutes réussies, il se calma et revint vers moi, le visage toujours aussi fier et satisfait de ses prestations.
Finalement quand je lui fis un petit signe de remerciement et d'adieu, ses traits redevinrent ceux d'un enfant tout simple, un petit poulbot de Djerba, mais qui a la chance de pouvoir s’enivrer de cette liberté qu'offrent les plages, le grand air, et les chevaux sur ce petit paradis qu'Ulysse aurait, parait-il, foulé de son pied . Quel privilège, même si peut-être, dans le fond, ce cavalier en herbe ne s'en rendait pas encore compte, tout à profiter de cet acquis.